Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/1065

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

circonstance ajoute beaucoup à mes scrupules de vous avoir invité au retour. Il y a, dans cette situation, une infinité de choses et de nuances qui se sentent vivement, quoiqu’on ne puisse les expliquer ; mais ce qui est très clair et ce que je vous exprimerai franchement, c’est que je ne voudrais jamais vous voir aux dépens d’aucune raison qui ait dû diriger votre marche, et que vous auriez fait plier à des considérations passagères ou à des affections partielles.

Rappelez-vous que, si j’ai besoin du bonheur de mes amis, ce bonheur est attaché, pour ceux qui sentent comme nous, à une irréprochabilité absolue. Voilà le point où j’espère que nous nous retrouverons toujours, et il est assez élevé pour que nous puissions nous y réunir malgré les vicissitudes du monde et l’étendue de l’espace.


410
[À BOSC, À PARIS[1].]
12 février 1791, — de Lyon.

Nous avons reçu hier votre bonne petite lettre du 7 et celle qui lui était jointe. Nous aurions de grand cœur accepté votre logis[2] si nous étions entre nous ; mais vous aurez vu par ma dernière que nous sommes en bande et que nous avons besoin d’être gîtés d’abord : ainsi je pense que vous aurez bien voulu vous occuper de notre logement suivant l’indication que je vous ai donnée, et j’en attends la nouvelle à Fontainebleau, comme je vous l’ai marqué. Nous partons mardi 15 au matin ; nous nous arrêterons, au plus, vingt-quatre heures à Villefranche, puis nous courrons vous joindre. Je ne vous dis plus rien des Parisiens puisque je vais les juger de visu. Dites, je vous prie, au brave Gibert que je n’ai pas trouvé le moment de lui écrire, mais que je m’en suis consolée par l’espérance de le voir bientôt.

Vous ne nous faites point part de votre opinion sur la question que vous fait Bancal ; à ce que j’en vois d’ici, la nouvelle législature n’est pas prochaine.

  1. Collection Alfred Morrison.
  2. Rue des Prouvaires, n° 32.