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sur Beauregard[1] et Montpeyroux ont fait écrire Lanthenas à Brissot et à M. Pigott… Ce dernier vient d’arriver à Lyon et peut-être se déterminera-t-il à aller visiter ces objets. Il parait résulter de leur comparaison que les Beauregard offriraient plus d’avantages que Montpeyroux ; j’avoue que si votre société ne peut trouver à se fixer dans le département du Rhône-et-Loire, je l’aimerais mieux dans celui du Puy-de-Dôme que partout ailleurs.

Mon bon ami n’entend pas volontiers ce parti moyen ; il vous regarde tous comme perdus pour nous si vous n’êtes pas nos près voisins ; je ne sais si c’est de ma part confiance ou modération, mais je confesse que je ne vois pas les choses ainsi, et j’imagine que des citoyens missionnaires, comme je vous envisage, ne craindraient pas deux journées de chemin pour venir nous visiter. J’ai même besoin de me persuader cela, car je ne vois que de bien faibles apparences pour votre établissement plus rapproché ; je considère l’Auvergne comme un lieu où vous devez tenir, et j’aime à penser que son département tient à celui que nous habitons.

Nous vous avons fait part de la nouvelle conspiration[2] au centre de laquelle nous nous trouvions placés quant au local ; elle a eu quelque effet sur Lyon, et voici comment. La première découverte des enrôlements s’est faite à Valence : les districts de cette petite ville se sont assemblés et, après s’être procuré des renseignements certains, ils ont écrit à la garde nationale de Lyon. Cette lettre ostensible a été imprimée et répandue avec profusion, les Amis de la Constitution l’ont adressée à toutes les gardes nationales et toutes les municipalités qu’ils ont imaginé devoir préférablement instruire, et c’est sur cette annonce que Mâcon, avec quelque aide de son voisinage, a fait investir le château de Bussy et saisir le ci-devant comte. Paris n’est encore pour rien là dedans. Les Lyonnais et leur garde, qui semblaient paralysés ensemble, se sont éveillés à la fois ; ils se sont assemblés légalement ; ils ont fait convoquer leurs assemblées primaires et ils travaillent à nommer un commandant-général, des aides-ma-

  1. Il y a plusieurs Beauregard en Auvergne. Nous croyons qu’il s’agit ici du château de Beauregard-l’Évêque (canton de Vertaison, à 20 kilomètres de Clermont), ancienne maison de plaisance des évêques de Clermont, que Massillon affectionnait.
  2. Voir sur cette affaire de Mignot de Bussy, qui causa beaucoup d’émotion à Lyon et dans la région, le Patriote français du 26 octobre, — et Wahl, 235-236, Mignot de Bussy, arrêté à Villié en Beaujolais le 17 octobre comme soupçonné de conspiration pour enlever le roi, fut conduit à Paris, enfermé à l’Abbaye et mis en liberté par un décret de l’Assemblée du 8 janvier 1791. (Tuetey, I, 1493 et suiv.)