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TIO-BLAS.

d’Espagne accorde ici à ses créatures, elle rêve tous les riches domaines d’Ovando ! Malédiction et opprobre sur mon pays ! Moi, noble d’Espagne, noble ruiné comme tant d’autres, je me suis fait marchand au lieu de mendier des faveurs près de la cour ; J’ai préféré le labeur à l’indolence, les voyages au repos ; et maintenant, parce que c’est le bon plaisir du roi, je me retrouve plus nu et plus pauvre qu’un muletier de Monte-Plata ! Par San-Domingo ! il n’en sera pas ainsi ! Grâce au ciel, je connais les mines mieux que personne ; quelques-unes se sont enfoncées dans les terres, d’autres reposent sur des monts dont l’accès est presque impossible ; dans la cavité des mornes j’ai su ramasser le diamant ; près du Bào j’ai trouvé des émeraudes. Toutes ces pailles souterraines n’attendent que ma voix pour éclater ; avec quelques esclaves je puis me remettre au travail ! Le ciel m’est témoin que si je voulais bâtir ici un temple comme Salomon, temple de pierreries et d’agates, c’était pour cette femme, dont l’amour remplit ma vie ! Me recevra-t-elle les mains vides ? Allons, Tio-Blas, va te jeter aux genoux de l’évêque ton parent ; demande lui de te sauver, ou bien fais-toi tuer par le marquis de Langey, car il ne te reste que le souvenir de ta richesse et la honte de te voir tombé dans la misère, fier cacique, qui vendais 140 piastres un grain d’or de ta rivière à un Anglais.

« Fuyant les roulemens précipités du tambour, j’étais arrivé près du Rio-Verde, mon ancienne source de richesses, mes noirs s’y tenaient encore les jambes dans l’eau et y ramassaient le sable dans