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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES.

Ils étaient tous deux richement montés en pierreries ; le double médaillon qu’ils contenaient était ovale : il représentait deux hommes, l’un en uniforme de simple capitaine de navire, l’autre en riche habit de velours, traversé d’un cordon bleu.

La figure du premier de ces deux hommes était intéressante au dernier degré, peut-être encore moins par son air de jeunesse et de haute distinction que par une pâleur mélancolique et précoce. Le souffle amer du découragement et du chagrin semblait avoir passé de bonne heure sur le front de ce jeune homme ; ses épaules étaient légèrement voûtées, son œil terne, ses joues amaigries. C’était un héros de roman dans toute l’acception de ce terme, mais un héros de roman qui avait lutté, combattu ; un martyr avant le temps, martyr pour une idée ou pour un amour ! Sa main pâle et maigre, veinée de grandes veines bleues qui lui imprimaient le froid du marbre, tenait un porte-voix de bâtiment ; derrière lui flottait le pavillon blanc aux armes de France.

Sur le dos de ce portrait que Finette eut soin de retourner, elle lut cette inscription : Marquis de Langey, né à Chollet en Vendée.

L’autre médaillon offrait les traits d’un personnage plus âgé, aux manières aisées, mais graves. Le repos et la santé épanouissaient son teint, il portait le front haut et le regard assuré. Sa perruque poudrée se déroulait en boucles égales sur son collet ; outre son cordon bleu, il était décoré de plusieurs ordres. Par une coquetterie d’homme mûr, que les peintres ne manquent jamais d’encourager, il s’était fait peindre