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LA CHEVALIERE.

une satisfaction ironique, un contentement d’elle-même qui le glaça de frayeur… Il n’ignorait pas la jalousie de la marquise, ses artifices, sa perpétuelle défiance. Par quel hasard fatal ou bienfaisant Mlle Agathe de La Haye se voyait-elle donc introduite chez sa cousine ? Le chevalier ne pouvait croire encore à l’aplanissement de ces obstacles ; cet acte de générosité tardive envers la belle fille lui semblait encore un rêve.

— À jeudi, Saint-Georges, je vous laisse réfléchir à la magnanimité de ma vengeance ; n’oubliez pas de venir… bien que vous ayez ce même soir le dîner de Mme la duchesse de Chartres… Vous verrez Agathe plus belle que jamais !

— Vous ne me trompez pas ! belle et heureuse !…

— Foi de chevalière, répondit-elle… Je consens à être appelée en combat singulier si je vous mens !

— Vous êtes charmante !

— Adieu, je remonte en fiacre et gagne incognito le Palais-Royal… Mlle Bertin nous y essaie ce soir nos robes… J’espère vous voir demain à l’Opéra… Vous viendrez ?

Saint-Georges lui baisa la main ; la marquise remonta dans sa voiture. Elle venait de se convaincre par elle-même que Saint-Georges aimait Mlle de La Haye.

— Jeudi, je serai vengée !… se dit-elle.

— Elle sera jeudi au Palais-Royal ! répétait Saint-Georges en se promenant à grands pas dans la salle d’armes…

Comme il demeurait ainsi absorbé dans ses pen-