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LE CHEVALIER DE SAINT-GEORGES

au besoin passer sa tête vénérable et surveiller son académie du fond de sa propre salle à manger.

Dans un angle de la salle se tenait alors une longue femme sèche ; ce n’était pourtant pas la chevalière d’Éon, c’était la vieille mère Dick.

Elle était chargée par le maître d’armes de la direction des fourneaux, de la garde des masques, de celle du vestiaire, et le plus souvent du punch à faire pour les tireurs.

— Allume les quinquets, dit en entrant La Boëssière, et surtout, mère Dick, dis au portier de ne recevoir que deux personnes qui se présenteront pour M. le chevalier, l’une à sept heures vingt minutes, l’autre à huit heures.

— Suffit, monsieur La Boëssière, suffit. Il y a ce soir une joute à La Râpée, et tous ces messieurs ont fait la partie de s’y rendre… Vous ne serez pas dérangés, je vous le promets.

— Y a-t-il du feu dans le vestiaire, et peux-tu nous faire à l’avance un peu de punch ? Nous devons trinquer dans l’entr’acte, mon cher Saint-Georges !

La mère Dick s’en fut et revint bientôt, plus morte que vive, dire à La Boëssière qu’une dame voilée le demandait.

— Son nom ? dit le maître d’armes.

— La chevalière d’Éon, a-t-elle répondu.

— Fais entrer.

Il s’en fut prendre deux fleurets très-soigneusement montés, et les plaça en croix sur une table de chêne.

— Madame la chevalière, reprit-il en se reculant de trois pas dès qu’elle parut, je me retire et respecte