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DEUX LETTRES

M. de la Madeleine… Vous savez qu’il y a moyen à ma salle de tout voir sans être vu.

— Oui, je sais, votre judas… mais gardez-vous en bien, mon cher professeur, ou plutôt réservez ce spectacle-là pour vous seul… la d’Éon ferait de beaux cris !

— On n’a pas idée de pareille chose ! j’aurais gagné deux mille livres au moins à vous afficher tous les deux en belles lettres moulées ! deux mille livres ! juste ce que ces infâmes comédiens des Français me demandent pour jouer ma comédie de Crispin valet d’Auteur !

— À propos de valet, je vous remercie de me rappeler mon heiduque ; je vais lui dire de porter à votre salle mon gilet, mes gants et mes fleurets… je veux recevoir le chevalier avec ce que j’ai de plus beau !…

— Êtes-vous en haleine, mon cher Saint-Georges ? avez-vous ce qu’il vous faut ? dit La Boëssière d’un air affairé. La d’Éon, la d’Éon dans ma salle d’armes !

Et le professeur se promenait d’un air de César ; il examinait avec une scrupuleuse attention les moindres détails de la toilette militaire du chevalier.

Platon avait extrait déjà d’une malle ces divers objets, il les disposait avec un soin minutieux sur un fauteuil.

— Bien, je vois des sandales comme il n’y a que vous qui en ayez, mon cher Saint-Georges : le chapeau qui les garnit est bien cousu… le poreux du cuir en dehors… à la bonne heure…

» Voilà, continua-t-il, un gant parfait… long et étroit… vous allez tirer comme un ange.