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baron de Drais, (il l’aurait appelé son frère en destinée) qui expérimenta la première fois sa draisienne en 1818 au jardin du Luxembourg et n’obtint, en fait d’attention, que les refrains de Desaugiers sur le vélocifère et la critique du Journal de Paris disant : « Le vélocipède est bon tout au plus pour faire jouer les enfants dans un jardin. » Si on consultait les appréciations émises à l’origine sur les drames et les contes de Villiers, ce serait quelque chose d’analogue, tandis que maintenant la draisienne et l’œuvre de Villiers sont partout répandues. En art, comme dans la vie, une invention n’est admise que quand tout le monde s’en sert.

Inventeur, Villiers le fut merveilleusement. Il comprit, le premier parmi les écrivains français, ce que la science moderne allait réaliser. Il la bafoua, parce qu’elle tuerait l’Idéal pour posséder ensuite le monde. Mais il la devina avec tous ses prochains miracles où elle irait jusqu’à vouloir prouver qu’elle suffit pour engendrer l’Univers et même des chefs-d’œuvre. À quoi servirait Dieu désormais ? Et aussi le génie ?

La science allait les suppléer, créer à son tour. Ne fallait-il pas protester, un peu, discrètement, en ironies ? Villiers écrivit son extraordinaire Ève future, le plus original de son œuvre, qui met en scène Edison et raconte les prochaines magies de l’électricité, du téléphone,