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a écrit un jour : « Je crois qu’il ne peut y avoir d’artiste sans le don de se souvenir et sans facilité. »

Or voyez comme, ici encore, à son insu, il est en concordance avec l’opinion de Delacroix. Celui-ci disait à un jeune peintre ; «  Si vous n’êtes pas assez habile pour faire le croquis d’un homme qui se jette par la fenêtre, pendant le temps qu’il met à tomber du quatrième étage sur le sol, vous ne pourrez jamais produire de grandes machines. »

Théories pareilles, œuvres pareilles. Aussi M. Besnard a-t-il produit à son tour ce que Delacroix, dans son argot d’atelier, appelait de « grandes machines », c’est-à-dire des peintures monumentales ; et, comme Delacroix avait décoré le Salon du Roi à la Chambre des députés, la galerie d’Apollon au Louvre, etc., lui compte déjà aussi dans son œuvre toute une série de décorations : à l’Hôtel de ville, a l’École de pharmacie, à la mairie de Saint-Germain-l’Auxerrois, et enfin à la Sorbonne.

Pour des peintres de ce tempérament, la peinture décorative est ce qui les excite et les séduit surtout. N’est-ce pas le plus difficile ? Et pour un vrai artiste, le plaisir commence avec la difficulté. Aussi l’école française, depuis Delacroix, n’aura possédé que deux peintres, M. Besnard et Puvis de Chavannes, faisant véritablement