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le savait bien sans doute, le jour où, après sa longue prédication, il descendit, d’un pas lent et ferme, et pour jamais, les marches de cette chaire illustre de Notre-Dame, tout de suite vide de lui et béante comme un tombeau. Il ne se fit point illusion. Il se rendit compte que son Exposé du dogme aux nombreux tomes, n’était vraiment qu’un plan de cathédrale sur le papier, une chose inanimée, et que quelques uns à peine consulteraient dans l’avenir. Au contraire, sa parole entendue avait été la cathédrale debout, et qui chante, pleine d’orgue, pleine de fleurs.

Ce jour-là, après vingt années de travaux, elle allait donc cesser d’être, en s’achevant. Sans faiblesse, tremblement de mains ou de voix, il en posa la dernière pierre, le commentaire final de l’amen du Credo, simplement, comme il avait accumulé toutes les autres pierres. Après cela, il irait s’occuper ailleurs ou se tournerait du côté du silence. Mais aucune mélancolie ! N’est-ce pas la marque d’une âme forte que de quitter les choses, c’est-à-dire se quitter soi-même, avec sérénité ? Ces grands moines, qui seront calmes devant la mort, sont déjà calmes devant l’adieu, devant l’absence, qui est la moitié de la mort.

Le P. Monsabré termina, sans orgueil, sans regret, sans un regard d’ensemble, ému et