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essayé de dire leur pays ; mais la plupart n’ont fait que de la poésie rustique monotone, et nul n’égale l’art de Brizeux qui en inventa le genre. Au reste, quelle autre contrée pouvait présenter une telle abondance de poésie, éparse dans ses paysages ? Les costumes d’abord, si originaux, conservés intacts, avec des broderies d’or et d’argent — chez les femmes — des étoffes vives, des dentelles, des bijoux, et surtout ces coiffes de lin, de tulle, variées de forme à l’infini, d’après chaque canton, mais toujours mettant sur la tête comme un frisson blanc de deux antennes ou de deux ailes.

Et quant aux hommes, ils étaient beaux au temps de Brizeux — beaucoup le sont encore aujourd’hui — avec leurs immenses cheveux qui les faisaient ressembler à des arbres.

La nature aussi était propice : des rivières, des bois, des rochers, des menhirs, des landes, des genêts d’or, des bruyères roses, des sapins et des chênes, mélancoliques horizons qui ondulent sous un soleil dans des brumes, comme un soleil d’argent.

Et, tout en cercle, la mer, le grand Océan qui imprègne sa poésie et qui, autour de ses vers semble aussi flotter, dans le blanc des pages !

Sans compter les traditions et les légendes, si curieuses qu’il n’avait qu’à les transcrire pour donner la sensation d’une odeur et d’une couleur