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III


Comme bien tu penses, la question qui ne tarda pas à passer au premier plan, ce fut celle de la cause de ce mystérieux suicide, du pourquoi. Il en devait être ainsi : la curiosité, qui est à peine un défaut dans les grands centres, prend, dans les petits endroits, les proportions d’un vice ; elle y devient une passion, aveugle comme toutes les passions, téméraire, déréglée, qui va de l’avant sans plus connaître d’obstacle. Elle ne calcule ni le prix des joies qu’elle veut, ni la valeur des victimes qu’elle fait ; elle peut pousser au crime, j’entends à l’un de ces crimes qui se commettent par des paroles, à l’un de ces meurtres qui tuent le bonheur d’une vie ou la paix d’une âme, et qui s’accomplissent tranquillement, sans offenser aucune loi, sans même laisser de remords dans la conscience de leur auteur. De fait, il n’y a pas de coupables : ces assassinats sont l’œuvre de tout le monde. Ils rappellent l’antique supplice de la lapida-