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— Tu ne sais donc pas encore l’horrible nouvelle ?

— Non, répondit ma mère. Qu’est-ce qu’il y a ?

— Le comte Pierre est mort.

Elle pâlit à son tour :

— Mais il n’était pas malade hier, dit-elle. Une mort subite ?

Mon père jeta un regard de mon côté, et répondit en baissant la voix :

— Il s’est tué !

— Oh ! mon Dieu ! mon Dieu ! s’écria ma mère, qu’est-ce que tu me dis là ?… Est-ce qu’une pareille chose est possible ?…

— Hélas ! oui.

Et ce furent des détails que j’écoutai avidement :

La veille, le comte Pierre avait paru tout le jour triste et préoccupé. Le soir, il s’était enfermé longuement avec sa femme, dont les domestiques remarquèrent, après cet entretien, les yeux rouges, l’air inquiet. Toute la nuit, il y eut de la lumière dans sa chambre, où il écrivait, classait des papiers, et, par moments, se promenait de long en large. Le matin, de bonne heure, on le vit dans le parc, en compagnie de M. Marian, qu’il quitta avec une poignée de main. Il remonta dans sa chambre, où on l’entendit encore marcher à pas agités. Puis on accourut au bruit d’une détonation. Il