Page:Rinn - Un mystérieux enlèvement, 1910.djvu/86

Cette page n’a pas encore été corrigée

dire ! La prudence tempérant la vanité, les plus ardents à se proclamer informés, devenaient, pour peu qu’on les questionnât, les plus circonspects à garantir la provenance de leur information.

Les on-dit n’en marchaient pas moins. Bien que demander rançon n’impliquât rien sur la qualité – brigands ou chouans – des ravisseurs, chacun tirait du fait argument en faveur de son sentiment. Le Préfet, par amour-propre de fonctionnaire jaloux du bon renom de son département et du loyalisme de ses administrés, voyait dans l’attentat un simple brigandage : qu’en Vendée, en Bretagne, en Normandie, pays où il suffisait de frapper du pied la terre pour en faire surgir des affidés, les chouans eussent ourdi un complot en vue d’un soulèvement prochain, la chose eût été possible ; en Touraine, où ils comptaient des partisans clairsemés et de foi plus tiède, rien de tel n’était à craindre ; supposé que des chouans eussent trempé dans l’affaire, c’était fait isolé, œuvre d’enfants perdus du parti ou acte de vengeance personnelle. Les partisans de l’opinion adverse objectaient que, si la guerre était close, les faits de chouannerie persistaient ; même ils se multipliaient depuis que les besoins de la guerre extérieure avaient dégarni l’Armée de l’Ouest ; l’espoir d’une revanche renaissait, on la préparait, et les chefs, en cette prévision, tiraient d’où ils pouvaient leurs subsides[1]. Et ils

  1. « En toute la région de la Basse-Loire, la guerre civile a laissé un résidu de gens vivant de meurtres et de rapine. À tout instant un déserteur audacieux, un vagabond entreprenant s’associe quelques hommes de son espèce. À huit ou dix ils tombent à l’improviste sur un village, forcent une habitation, pillent une recette, attaquent une diligence, rançonnent un propriétaire. La terreur qu’ils inspirent est telle que les habitants n’osent les signaler et faciliter l’action de la Justice. Les préfets, en vain, multiplient les moyens de rigueur, les moyens d’indulgence, rien n’y fait. Quelques bandes vont vagabonder plus loin, et on en retrouve jusqu’aux environs de Sancerre et de Nevers. » Vandal.