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Quel intérêt, public ou privé, était en jeu ? On épiloguait à l’envi : on supposait tout ; on ne s’arrêtait à rien, et tant d’incertitude pesait. On sut que le jugement était soustrait à la juridiction ordinaire et déféré à un tribunal spécial. La nouvelle n’était pas de nature à atténuer l’émotion. Du moins amena-t-elle une trêve aux conjectures. La solution était proche ; il fallait attendre. Les débats apporteraient la lumière.


III

Ils apportèrent de nouveaux doutes. On savait maintenant, de façon positive, que ravisseurs et libérateurs étaient gens du même bord ; les uns comme les autres avaient servi dans les armées vendéennes, ils se connaissaient. On savait aussi que, des ravisseurs, au nombre de six, trois seulement avaient été reconnus, payant de leur tête cette reconnaissance. Et les autres ? Qu’étaient-ils devenus ? Qui étaient-ils ? Fallait-il les chercher parmi les libérateurs ? La non-comparution de ces derniers aux débats (ils n’avaient pas même été cités) encourageait la supposition. Devaient-ils leur salut à des aveux couverts par une promesse d’impunité, d’oubli ? Assurément une main puissante les avait dérobés à la justice, au châtiment. Laquelle ? Qui donc était assez hardi pour avoir promis pareille chose, assez audacieux pour l’entreprendre, assez fort pour y réussir ? Un nom était sur toutes les lèvres, sans qu’aucune bouche osât le prononcer, celui de Fouché ; Fouché, un abîme d’intrigues ; Fouché, « habile à se servir de tout et de tous pour édifier et sauvegarder sa situation[1] » ;

  1. Madelin, Fouché.