Page:Rinn - Un mystérieux enlèvement, 1910.djvu/155

Cette page n’a pas encore été corrigée

gardait par devers lui les renseignements recueillis, retenait les inculpés. Pour avoir communication des uns et recevoir les déclarations des autres, le Directeur du Jury dut recourir à l’intervention du Ministre de la Justice, lui-même tenu à l’écart de tout. Encore Fouché ne céda-t-il que forcé dans ses derniers retranchements. Crainte de révélations compromettantes, ou désir de brouiller les cartes pour jouir du mérite de les avoir ensuite débrouillées ? Non ; mais système, présentant double avantage : il fournissait des indications profitables à la Police générale ; il offrait moyen de contrôler la confiance que méritaient ses agents. Dominer les événements pour ne pas être dominé par eux, et, à cette fin, employer toutes les voies, telle il concevait sa mission. Par contre, cet empiètement sur les attributions de son collègue à la Justice inspirait à beaucoup des doutes sur la sincérité de l’enquête, et scandalisait certains : « Si l’on ne trouvait pas des motifs de sécurité dans la conviction des bonnes intentions du Ministre, écrivait un des correspondants de Clément de Ris[1], il faudrait déplorer le bouleversement de principes qui réduit le système judiciaire à une sorte d’administration arbitraire. Cette confusion des pouvoirs en un seul pouvoir, sans balancement, sans garantie publique ni privée, lors même qu’elle peut être utile en résultats, me semble toujours devoir paraître affligeante aux vrais amis de la liberté et de leur pays. »

Si des doutes s’élevaient sur la correction de l’immixtion du Ministre de la Police dans l’instruction judiciaire, les mesures édictées par lui en

  1. Le citoyen Fontenay. Correspondance privée de Clément de Ris.