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HÉLÈNE ET MICHEL

Marie-Claire, elle, venait vers Michel, offrant sa jeune âme pleine de cette tendresse romantique et pure qui fait battre le cœur des petites filles que les poupées ne satisfont plus et où l’amour maternel n’a pas encore fleuri. C’était une jolie fille que Marie-Claire. Elle avait une chevelure rousse, une peau lumineuse où les yeux noirs faisaient contraste. Elle aimait Michel au point de passer de longues heures assise parmi les framboisiers de l’autre rive lorsque, tapi dans son refuge, il se jouait à lui-même les airs qu’il préférait. Il le lui avait pourtant défendu.

Mais au fond, il ne lui déplaisait point de se savoir ainsi admiré à distance, d’avoir quelqu’un qui vît en lui le musicien, l’artiste. De tout le reste du monde il ne se souciait guère.

L’école ? Il y allait sans penser, aux heures fixées par le règlement. Jamais en retard de crainte de se mettre à dos les professeurs dont la plupart n’étaient point commodes. Il étudiait raisonnablement, se faisant inconsciemment et peu à peu à la routine du travail ; passant de la géographie au catéchisme et à la grammaire avec indifférence. Chose curieuse, depuis l’effort qu’il avait fait pour gagner son violon, les chiffres lui étaient relativement faciles. Il restait premier en comptabilité.