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— Mais, poursuivis-je après une pause, beaucoup d’autres choses en Russie viennent encore de Dieu. On a le sentiment que chaque chose nouvelle, chaque vêtement, chaque plat nouveau, chaque vertu et même chaque péché doivent d’abord être autorisés par lui, avant d’entrer en usage.

Le malade me regarda, d’un air presque effrayé.

— Ce n’est que sur un conte que je m’appuie en disant cela, me hâtai-je de le rassurer, une bylina, comme on dit, ce qui signifie : une chose qui a été. Je veux brièvement vous en dire le contenu. Le titre est : « Comment la trahison vint en Russie ».

Je m’appuyai contre la fenêtre, et le paralytique ferma les yeux comme il faisait volontiers, lorsqu’une histoire commençait quelque part.

— Le terrible tsar Ivan voulait imposer un tribut aux princes qui étaient ses voisins et les menaçait d’une grande guerre s’ils n’envoyaient pas de l’or à Moscou, dans la ville blanche. Les princes, après avoir tenu conseil, dirent comme un seul homme : « Nous te pro-