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Les derniers empereurs de la cinquième dynastie vécurent dans la mollesse et la débauche. Les annales chinoises n’offrent plus, pendant quelques siècles, que des crimes, des guerres civiles, des révolutions de palais. Les empereurs et les dynasties se succèdent avec rapidité, et à peine voit-on de temps en temps le règne éphémère d’un bon prince. Le calme et la prospérité ne revinrent dans l’Empire que sous les premiers princes de la treizième dynastie (636 ans après J.-C.). Le règne de Taï-tsoung, contemporain de notre roi Dagobert, est surtout digne d’attention. Cet homme supérieur, qui recula encore les limites du vaste Empire, s’occupa surtout de réorganiser l’administration et de soulager le pauvre peuple, que les guerres civiles et les excès de ses prédécesseurs avaient réduit à la dernière misère. Aussi le nom de Taï-tsoung est-il resté, en Chine, comme le type du bon empereur. Les historiens sont remplis d’anecdotes qui prouvent combien ce grand homme était digne de l’amour de ses sujets.

La seconde année de son règne, les campagnes furent dévastées par une multitude innombrable de sauterelles. L’Empereur, voyant le dégât que faisaient ces insectes, en ramassa un, le mit dans sa bouche, et dit en soupirant : « Malheureuses sauterelles, vous dévorez les moissons et la substance de mon peuple. Eh ! que ne dévorez-vous plutôt mes entrailles ! »

Il serait trop long de rapporter toutes les belles paroles de ce prince, qui à composé, sous le titre du Miroir d’or, un livre admirable sur l’art de régner. « Le salut de l’Empereur, dit-il un jour, dépend de l’état heureux où il maintient ses sujets. Un prince qui foule et qui épuise son peuple pour s’enrichir ressemble à un homme qui couperait sa chair par petits morceaux pour s’engraisser de sa propre substance. Quand le peuple est accablé de misère, que devient l’Empire ? n’est-il pas sur le penchant de sa ruine ? Et l’Empire venant à périr, quel est le sort de l’Empereur ? »