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son frère, et implorant pour celui-ci leur appui et leur secours. Ce pieux devoir rempli, il reprit le chemin de l’exil ; mais à peine avait-il fait quelques pas, qu’un brillant cortège vint à passer : c’était Wang-po qui se rendait au palais auprès de l’Empereur. À la vue de son frère chargé de chaînes, l’infâme pâlit, et détourna la tête.

— Va, lui dit Kia-tan d’un ton mélancolique, mais sans amertume, va, poursuis ta route et sois heureux, si tu peux encore l’être. Depuis que nous sommes sur cette misérable terre, tu n’as pas cessé de faire mon malheur, mais je ne te maudis pas ; je ne puis oublier que tu es mon frère. Adieu pour jamais !


Les environs de Vou-Chang, capitale de la province de Hou-Quang, étaient-fort animés. On célébrait, en présence du gouverneur général, la fête de la Vache, qui a lieu ordinairement dans les premiers jours du printemps. Tous les gens de la campagne, portant ou traînant les instruments du labourage, escortent avec des musiciens et des histrions une grande vache en terre cuite, dont les cornes sont dorées. Derrière cette figure gigantesque est un enfant qui a un pied chaussé et l’autre nu, et qui frappe l’animal d’un bâton, comme pour le faire, avancer : c’est, dit-on, le symbole de la diligence et du travail. Après avoir parcouru les champs, le cortège se présente devant le gouverneur ; on brise la figure de terre, et on tire de ses flancs une multitude de petites vaches d’argile qu’on distribue aux principaux spectateurs. Le gouverneur adresse au peuple une allocution sur les bienfaits de l’agriculture, et la fête se termine par des danses et des jeux.

Le vice-roi de Hou-Quang, après avoir assisté à une partie de la cérémonie, se mit en route pour une de ses résidences de campagne. À peine s’était-il éloigné du lieu de la fête, qu’une troupe