Page:Richomme - Contes chinois, précédés d'une Esquisse pittoresque de la Chine, 1844.pdf/184

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Une espèce de boulevard, pavé en larges pierres de taille, entoure la ville. Vous ne pouvez, mon cher ami, vous faire une idée du curieux spectacle que présente ce boulevard, encombré par les voitures et des marchands de tout genre : c’est un vacarme épouvantable, auquel ne contribue pas peu la musique des comédiens ambulants qui donnent des représentations en plein vent. J’ai joui du coup d’œil assez longtemps, car mes guides sont restés au moins une heure avant de pouvoir se frayer un passage. Enfin je suis arrivé à bon port, et suis descendu dans une riche hôtellerie qui n’est autre qu’une embarcation sur le canal ; car les champans ne sont pas seulement les habitations des portefaix et des ouvriers, ce sont aussi des boutiques, des auberges, des lieux de plaisirs.

Tout en prenant le thé, auquel par parenthèse j’ai eu grand’peine à m’habituer, car on le boit en Chine fort faible et sans sucre, je vous écris mes premières impressions. Je compte rester trois jours à Pékin, et, dès demain matin de bonne heure, je vais parcourir la ville, à moins que je ne sois inquiété, en ma double qualité d’Européen et de prêtre catholique. Heureusement j’ai une lettre de recommandation pour un riche mandarin lettré, cousin du vice-roi (tsoung-tou) de la province. Vale et me ama.


II
Le même au même.


Je suis fatigué, abîmé, épuisé, et, par-dessus tout, émerveillé. J’ai couru la journée entière à travers cet immense dédale qu’on appelle Pékin, et je crois, en vous écrivant, mon cher ami, avoir vu en réalité les admirables fantaisies des Mille et une Nuits. Mon Dieu ! combien d’épithètes se seraient échappées de la plume