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les vertus de son digne père, et il n’oubliera jamais que ses ancêtres se sont distingués dans les fonctions publiques depuis l’empereur Hoang-ti.

L’enfant s’inclina avec respect devant sa mère, puis devant son maître et, sur un signe de celui-ci, il alla se placer parmi ses petits compagnons. Sa mère se retira ensuite, après avoir échangé avec Siang de nouveaux compliments.

Sur l’ordre de l’instituteur, les élèves entrèrent en silence dans la classe. Siang offrit les sacrifices aux esprits et aux instituteurs des premiers temps ; puis s’agenouillant devant une tablette sur laquelle étaient inscrits les noms de Fou-Hi et de quelques autres sages de l’antiquité, il invoqua pour son nouvel élève la protection de ces grands philosophes. Tchoung-ni, qui était resté à genoux, se leva après la cérémonie, croisa les bras sur sa poitrine et se prosterna devant son maître ; il alla s’asseoir ensuite à la place qui lui fut désignée. Les écoliers tirèrent au sort avec de petites baguettes de bambou l’ordre suivant lequel ils devaient réciter leurs leçons, et la classe commença.

La gravité extraordinaire de Tchoung-ni, la politesse avec laquelle il saluait son maître et ceux de ces camarades qui étaient plus âgés que lui, l’attention qu’il apportait à tous les exercices excitèrent la jalousie des uns, les sarcasmes des autres. Les enfants sont les mêmes, dans tous les pays, à toutes les époques ; cet âge est sans pitié. Humiliés secrètement des éloges que Siang adressait chaque jour à son nouvel élève, ils s’en vengeaient pendant les récréations en accablant l’enfant de railleries, en lui faisant de mauvaises niches, en le tournant en ridicule.

— Vois-le donc, disait l’un, ne dirait-on pas qu’il a peur de tomber, tant il marche doucement ?

— Prenez donc garde, jeune sage, criait l’autre, et levez les yeux ; tout en réfléchissant, vous allez vous heurter contre le mur.