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LES ÎLES D’OR


LVII


Enivre-toi toujours pleinement, follement,
Du bonheur qui surgit, île d’or d’un moment,
Tu l’analyseras plus tard, à le revivre.
Mais pendant qu’il est là, jouis, sans plus, sois ivre.
Parfois, après un jour où le vent des déserts
A cuit le ciel, rôti le sol, flambé les airs,
La caravane trouve en l’oasis lointaine
Une mystérieuse et limpide fontaine.
Dans le fond de la vasque aux antiques pavés,
Des vers, en un langage inconnu, sont gravés.
Ce que disent les vers, nul ne veut le connaître.
À rafraîchir sa soif chacun met tout son être.
Ces pauvres gens sont dans le vrai. Fais ce qu’ils font,
Et bois à la fontaine et ne lis pas au fond.