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MES PARADIS


XXXII


J’ai vécu. Voici mon avis.
Fuis le baiser de la Chimère
Qui vous laisse une soif amère
Et des désirs inassouvis.

Concentre tous tes sens ravis
Dans cet ici-bas éphémère.
La terre est ta femme et ta mère :
Greffe-toi sur la terre, et vis.

Dans ses entrailles prends ta force,
Comme un chêne. Que ton écorce
Se gonfle de son suc vivant.

Et tends tes poings noueux pleins d’elle,
Pour que la Chimère, ce vent,
Y casse en hurlant ses coups d’aile.