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LA CHANSON DU SANG

J’entends, comme un enfaneon,
L’obscure et rouge chanson
Qui bourdonne dans mes veines.

Dans ces canaux azurés,
Qu’est-ce que vous murmurez,
Globules plein de mystères,
Infatigués pèlerins
Errant par les souterrains
Ténébreux de mes artères ?

Que de clameurs à la fois !
Ce sont les milliers de voix
Qu’eurent mes milliers d’ancêtres,
Les cris de guerre et d’amour
Qu’ils ont poussés tour à tour
Dans la bataille des êtres.

Chaque atome a ramassé
Un souvenir du passé
Qu’il roule à travers les âges,
Et ces échos clandestins
Résonnent dans nos destins
Qu’ils règlent de leurs présages.