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Histoire

tine se relâchoit de sa résolution ? Mes Amis en seroient affligés, sans doute, & moi je le serois aussi ; plus encore, je l’avoue, que si la visite n’avoit pas été rendue à ma Grand-Mere. Mais la profonde vénération que j’ai toujours marquée pour Clémentine n’auroit été qu’une apparence, une affectation, si, dans toutes les suppositions possibles, je n’étois résolue de faire au moins mes efforts pour calmer mon esprit, & d’abandonner mes espérances à celle qui a les premiers droits. Je croirois même sa tentative, quoique sans succès, digne de ma plus haute estime. Ce qui est une fois reconnu pour juste, doit emporter notre soumission. Ce mérite augmente par la difficulté. Votre Henriette, alors, voudroit vaincre ou mourir. Dans le premier cas, elle seroit plus grande que Clémentine même. Ô ma chere ! on ne sait point, jusqu’au moment de l’épreuve, à quoi l’émulation peut élever une ame vive & généreuse.

Vous aurez une copie des deux Lettres, transcrites par Lucie. Elles m’ont rendue fiere, peut-être trop, & j’ai besoin d’être humiliée ; mais je n’attendois pas ce service de ma Charlotte. Vous verrez avec quelle délicate reconnoissance il traite l’endroit où ma Grand-Mere lui dit, que je connois par expérience ce que c’est qu’un Amour divisé, & la préférence que nous avons donnée sur nous à Clémentine. Vous savez, ma chere, quelle est notre sincérité sur ce point. Il y a