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du Chev. Grandisson

un discours, qui me l’auroit fait regarder comme un homme inspiré, si j’avois pu croire qu’il l’eût fait sans préparation. N’espérez pas, chere Tante, que je puisse vous le rendre. Où prendrai-je la même éloquence, & le même feu ? J’avois déja remarqué dans ses entretiens, que ces Ministres Romains ont un tour d’esprit qui leur est propre, un caractere particulier de zele & d’habileté, qu’ils doivent sans doute à l’éducation de leur Ordre ; & je ne m’étonne point qu’on leur attribue tant de part aux événemens du monde. Malgré la différence de nos principes, qu’ils sont grands à mes yeux, si c’est la Religion qui les conduit !

L’ardent Jésuite a repris d’abord toute l’histoire de la maladie de Clémentine, en nous faisant observer qu’ayant toujours eu sa confiance par les droits de son ministere, & voulant user de la liberté qu’elle lui laissoit de révéler tout ce qui s’est passé sous ses yeux, personne n’en pouvoit rendre un compte plus fidele. Les faits sont les mêmes, que nous avons lus dans les Lettres de Sir Charles. Mais avec quels traits nous a-t-il représenté les sentimens ! Quelle peinture des anciens combats de Clémentine, & de toutes les agonies de son cœur ! Il nous a tiré vingt fois des larmes. L’adroit Orateur nous en faisoit donner un moment à la pitié, & les séchoit aussi-tôt par la terreur. Il s’arrêtoit quelquefois dans ces grandes crises, comme pénétré des mêmes impressions. Ce silence redoubloit les nôtres, & nous rendoit immo-