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Histoire

votre chere Sœur. Personne n’a pu s’attendre que je donnasse à l’argument, tout le poids qu’il peut recevoir : cependant, persuadé comme je le suis, que son devoir l’oblige de se rendre aux instances de sa Famille, j’ai suivi les inspirations de l’honneur. Jamais, peut-être, il n’y eut d’exemples d’autant de situations difficiles que celles de votre Ami, qui, sans avoir à se reprocher la moindre témérité, s’est vu, comme par degrés, dans les plus grands embarras.

Vous souhaitez, cher Jeronimo, que j’eusse la force de donner l’exemple à votre excellente Sœur. Il faut que je vous ouvre mon ame.

Il existe une jeune personne, une Angloise, belle comme un Ange, mais en qui la beauté, à mes yeux comme aux siens, est la moindre perfection. De toutes les femmes que j’aie jamais vues, c’est elle, elle seule, que j’aurois été capable d’aimer, si je n’eusse aimé Clémentine. Je ne lui rendrois pas justice, si je n’ajoutois que je l’aime, mais c’est d’un amour aussi pur que le cœur de Clémentine, ou le sien. L’état de Clémentine faisoit une vive impression sur moi. Je ne pouvois m’en déguiser la cause. Son affection paroissoit si ferme, que de mon côté, pouvant la regarder réellement comme mon premier amour, j’ai cru que, malgré des difficultés qui me sembloient invincibles, l’honneur, la reconnoissance devoient me tenir en suspens, m’empêcher même de