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Histoire

sur un fauteuil, & m’asseyant près d’elle, je pris ses deux mains dans les miennes. Elle fit quelques efforts pour parler. Remettez-vous, Mademoiselle : comptez sur les plus tendres attentions, sur tout le zele d’un véritable Frere.

Généreux homme, me dit-elle enfin ; êtes-vous capable de me pardonner ? Est-ce du fond du cœur que vous me témoignez de la joie ? Je veux m’efforcer de me remettre. Vous m’avez parlé du reproche que je me fais à moi-même. Hélas ! je m’en fais réellement. Ma démarche porte une triste apparence ; cependant je ne puis condamner, ni consentir que vous condamniez mes motifs.

Je ne les condamne point, Mademoiselle. Tout ne sauroit manquer de tourner heureusement. Reposez-vous sur mes conseils & sur ma protection. Mes Sœurs, leurs Maris, toutes les personnes que j’aime, sont remplies d’admiration pour vous. Vous allez vous trouver dans une Société de cœurs tendres, qui se feront honneur de votre confiance.

C’est verser du baume dans les blessures du mien. Qu’est-ce qu’une Femme, lorsqu’elle croit avoir des difficultés à combattre ? Ma terreur a commencé trop tard ; j’étois embarquée, le Vaisseau avoit déja mis à la voile ; je ne fus pas capable de changer les ordres que j’avois donnés, jusqu’à ce que le vent, qui avoit été favorable à mon départ, mit un obstacle invincible à mon retour. Alors je n’osai m’abandonner trop à mes tristes ré-