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du Chev. Grandisson
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bonheur. Que puis-je faire pour elle, qui ne lui soit pas dû ?

Ses bras m’ont quittée : elle s’est dégagée des miens, qui la tenoient embrassée. Laissez-moi, laissez-moi sortir, Madame. Elle s’est précipitée dans l’appartement voisin. Je l’ai suivie ; & prenant sa main, ne me laissez pas dans cette inquiétude, chere Émilie ! vous ne me quitterez point. Si vous avez pour moi toute la tendresse que j’ai pour Émilie, vous me donnerez le moyen de soulager l’oppression du plus innocent & du plus aimable des cœurs. Ouvrez-vous, ma chere, ouvrez-vous à moi.

Ô Mylady Grandisson ! digne Femme du meilleur des Hommes, vous devez me haïr.

Haïr, ma chere Émilie !

Oui, vous le devez.

Asseyons-nous dans cette chambre, si vous ne voulez pas revenir dans mon cabinet.

Je me suis assise sur un sofa. Elle s’est placée près de moi, en appuyant ses joues brûlantes sur mon épaule. J’ai passé un bras autour de son cou, & de l’autre main, j’ai pris une des siennes. À présent, ma chère, je vous conjure par l’amitié, cette amitié de Sœur qui est entre nous, de m’ouvrir entiérement votre cœur. Renoncez-moi, si, recevant le pouvoir de guérir vos blessures, je n’y verse pas le baume d’une inviolable tendresse.

Que puis-je vous dire ? Hier, ma très-chere Mylady, je reçus la réponse du docteur Barlet à une question que je lui avois proposée, de la part d’une jeune Créature, qui…

Elle n’a pu achever. Elle a pleuré. Elle a levé la tête ; elle s’est essuyé les yeux. Ensuite son visage s’est encore appuyé sur mon épaule, & j’ai repassé le bras autour de son cou. Votre question, mon amour ?

Ah, Mme  ! ma question, dites-vous, ma question !

Je n’ai dit la vôtre, ma chere, qu’autant que c’est vous-même qui l’avez proposée au Docteur.

Il ne vous a donc rien dit, Madame !