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du Chev. Grandisson.

joie pour lui en causer beaucoup ; de la joie à votre Frere, chere Mylady ! à Sir Charles Grandisson !

Il a remarqué que j’étois fortement émue ; & mes sentimens croissoient en effet par la réflexion. Il m’a dit d’un ton tranquille ; je vous laisse, très-chere Miss ; je descens pour aller recevoir les félicitations de tous nos Amis communs. Après tant d’incertitudes & d’étranges événemens, c’est de ce jour que je date mon bonheur.

Il m’a quittée, avec un regard tendre & respectueux. Je n’en ai pas été fâchée. Cependant mes yeux l’ont suivi. J’ai pris plaisir à voir jusqu’à son ombre, pendant qu’il descendoit l’escalier.

Ma Tante est montée quelques momens après. Elle m’a trouvée fort pensive. Je m’étois reproché d’abord un excès d’empressement ; ensuite je m’étois justifiée moi-même, ou du moins j’avois cru le pouvoir : & mêlant cent délicieuses circonstances à mes reproches & à mes justifications, j’y trouvois de quoi bénir éternellement mon partage. Telle étoit, par exemple, l’idée des Parens & des Amis que je vais acquérir, & celle du même avantage pour les miens. Mais mon Émilie, ma chere Émilie ! Je la considérois comme ma Pupille, autant que la sienne. C’est dans ces méditations, que ma Tante m’a trouvée. Elle m’en a fait sortir en m’embrassant, en m’applaudissant ; elle a levé tous mes scrupules sur l’empressement dont je m’accusois ; elle m’a fait le récit des félicita-