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du Chev. Grandisson.

digne aujourd’hui de son affection, me suggere que toutes mes disgraces peuvent être un châtiment du Ciel, pour avoir souffert que mon cœur fût engagé par un Hérétique. Il m’est absolument défendu de penser à réparer ma faute, par la seule démarche que j’en aurois cru capable.

» Vous me dites, Madame Bémont, & toute ma Famille m’assure comme vous, que l’honneur, la générosité & l’estime dont je fais profession pour le Chevalier, m’obligent également de contribuer au bonheur d’un homme, dont j’ai trompé les espérances, & vous êtes persuadée qu’il existe, dans sa Patrie, une femme capable de le rendre heureux ; mais je dois, dites-vous, lui donner l’exemple. Moi ? Il est impossible. Non, l’honneur & ma juste délicatesse ne me le permettront jamais.

» Mais pressée, comme je le suis, tremblante encore de voir un Pere à genoux, une Mere noyée dans ses larmes ; & jugeant, avec raison, que je ne puis vivre long-tems, qu’une rechute dans la plus terrible des maladies peut devenir la punition de ma désobéissance, & qu’à ma derniere heure, ce sera une consolation pour moi, de penser que je me suis soumise à la volonté de mes Parens, sur un point auquel ils paroissent invariablement attachés ; d’ailleurs apprenant d’eux-mêmes, qu’ils regarderont mon obéissance comme une compensation pour toutes les peines que je leur