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Histoire

tout ce qui s’est passé, je ne laisserai pas d’être exacte sur les détails. Eh ! que s’est-il passé ? Lisez, ma chere.

Sir Charles nous a tenu compagnie à déjeuner. Il est entré d’un air fort grave ; mais bientôt la gravité a fait place aux accompagnemens ordinaires de son visage, qui sont la douceur & la bonté.

Mylord lui a témoigné l’inquiétude où nous étions depuis hier au soir, sur les nouveaux sujets de peine qu’il avoit trouvés dans ses Lettres. Émilie, sans ouvrir les levres, a fait lire la sienne dans ses yeux. Miss Grandisson a pris une contenance sérieuse. Mylady L… avoit l’impatience peinte sur son charmant visage ; & le Docteur Barlet s’est tenu assis, de l’air d’un homme qui est déterminé au silence. Pour moi, je suppose qu’on auroit lu dans mes traits la crainte & l’espérance, partagée comme j’étois entre l’une & l’autre, & ne sachant si je devois souhaiter la conférence annoncée. Aussi me suis-je senti les joues brulantes.

Sir Charles a répondu : n’admettons rien que d’agréable, Mylord, dans cette délicieuse compagnie. Il s’est informé civilement de ma santé, & de la maniere dont j’avois passé la nuit, à l’occasion d’un rhume fort leger, qui changeoit un peu ma voix. Il a voulu savoir d’Émilie, pourquoi elle paroissoit triste ; de Mylord & de Mylady L…, quand ils se proposoient de retourner à la ville ; de Miss Grandisson, ce qui lui don-