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Histoire

Oui, oui, Henriette, dit Miss Grandisson, vous brillerez aux dépens de la pauvre Charlotte ; mais puisque j’ai perdu les bonnes graces de mon Frere, puissiez-vous en jouir à ma place ! Ce que j’ose bien promettre, c’est que je ne lui donnerai jamais sujet de me reprocher que je le prends pour mon Cousin Everard. Mais ai-je poussé l’extravagance bien loin ? Parlez franchement, Henriette. Ai-je été fort extravagante ? Je lui ai répondu qu’elle s’étoit égarée depuis le premier mot jusqu’au dernier : que j’avois d’abord tremblé pour elle, mais qu’en l’entendant parler des soupirans qu’elle vouloit avoir à sa suite, & des nouvelles conquêtes qu’elle sembloit se proposer, je l’aurois volontiers grondée si je n’avois été retenue par la présence de son Frere. Me le pardonnerez-vous ? lui ai-je dit à l’oreille, votre langage étoit celui d’une fiéfée coquette, & l’air y répondoit parfaitement. En vérité, chere Charlotte, vous ne vous êtes jamais tant oubliée.

Ainsi, tout le monde est contre moi, a-t-elle repris. Il faut que je sois bien coupable en effet.

Le tems, l’occasion, ma Sœur, lui a dit Mylord L… étoient mal choisis. Si le sujet avoit été moins important, Sir Charles auroit tourné vos vivacités en plaisanterie, comme il a toujours fait. C’est-à-dire, a-t-elle repliqué, que tout ce qui lui déplaît, ou qui ne lui ressemble pas, est blâmable.