Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 2, 1763.djvu/327

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
117
du Chev. Grandisson.

[Elle commençoit à mettre la Lettre en pieces.]

Sir Ch. Je m’y oppose, Charlotte. Rendez-moi, s’il vous plaît, cette Lettre. Une femme n’a jamais droit de tourner en ridicule un Amant qui lui déplaît. Si son indifférence pour lui vient de la haute opinion qu’elle a d’elle-même, elle lui doit de la pitié ; mais quelles que soient ses idées, celle qui blesse doit guérir. M. Watkins peut s’adresser à cent femmes, auxquelles ses richesses & la figure qu’il fait dans le monde, feront pardonner son Ortographe.

Miss Grand. La saison de la joie s’approche. On n’est pas fâchée d’avoir quelquefois en public un ou deux soupirans à sa suite. Peut-être n’ai-je pas encore assez vu les deux miens, pour me déterminer en faveur de l’un ou de l’autre. N’est-il pas permis, puisqu’aucun des deux n’est d’un mérite brillant, de chercher à les voir sous différens jours, pour se mettre en état de juger lequel est le plus supportable ; & pour attendre s’il ne s’offrira pas quelqu’autre personnage, qui me déplaise encore moins ?

[Elle a fait cette réponse de son air le plus folâtre, quoique le sujet fût si sérieux, & que son Frere ne souhaitât pas moins sérieusement de connoître ses inclinations.] Sir Charles s’est tourné vers Mylord L…, & lui a dit gravement qu’il s’étonnoit que leur Cousin Everard fît un si long séjour au Château de Grandisson. Miss Charlotte a