Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 2, 1763.djvu/261

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
51
du Chev. Grandisson.

pour moi de cette aventure. Est-il possible qu’elle en ait pleuré ? La tendre, l’indulgente Mere ! Mon Oncle n’a pas été si compatissant. Il est charmé de cette scene. Il croit, dites-vous, que les deux Sœurs n’ont rien fait qu’il n’eût fait lui-même. C’est un compliment, sans doute, qu’il prétend faire à leur délicatesse. Mais je suis persuadée, comme ma Tante, que leur généreux Frere ne les auroit pas remerciées de la frayeur que leurs railleries m’ont causée.

N’est-il pas tems, ma chere Lucie, que je pense à vous rejoindre ? Je rougis dix fois le jour de me voir ici comme dans l’attente d’une favorable ouverture, & dans la crainte néanmoins qu’elle n’arrive jamais. J’y trouve une apparence de dessein, une affectation qui ressemble… je ne saurois dire à quoi : mais il y a des momens où j’ai peine à me supporter moi-même. Cependant, tandis que le goût de la vertu, peut-être un peu trop personnel, sera le fondement de ces desseins, de cette attente, de ces agitations, je ne me croirai pas tout à fait inexcusable. Je suis sûre que je n’aurois pas cette estime pour leur Frere, s’il avoit quelques vertus de moins.

Pourquoi M. Dean m’est-il venu mettre dans la tête que Miss Jervins flatte & nourrit, peut-être, sans le savoir, une flamme qui deviendra funeste à son repos ? Assurément cette petite Créature ne peut espérer… Cinquante mille Guinées néanmoins sont