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du Chev. Grandisson.

le silence tout ce qu’il savoit de cette étrange avanture.

Il ne faut pas, ma chere Sœur, que ces précautions vous offensent. Combien de jeunes personnes, auxquelles il ne manquoit rien du côté de la naissance & de l’esprit, se sont laissées entraîner beaucoup plus loin ? Avec de grandes qualités, car j’ai une fort haute opinion de ma Charlotte, on ne tombe pas ordinairement dans de petites fautes. La plupart des femmes, qui commencent à se lier avec notre sexe, se flattent de pouvoir s’arrêter lorsqu’elles en auront la volonté. Elles s’abusent. Nous, & l’Esprit noir qui nous met en action, auquel souvent on donne mal-à-propos le nom d’Amour, nous réussirons presque toujours à vous en empêcher. Les deux sexes font l’office de Démons l’un pour l’autre. Ils n’ont pas besoin d’autres Tentateurs.

Tout doit être terminé avant la fin du jour, & votre promesse sera remise entre mes mains. J’en félicite ma Sœur. Elle est à présent maîtresse d’elle-même, & libre dans son choix. Après avoir heureusement servi à la délivrer d’un joug, je ne me pardonnerois pas de l’engager sous un autre. Ne pensez ni à Mylord G…, ni au Chevalier Watkins, si votre cœur ne vous dit rien pour l’un ni pour l’autre. Vous m’avez quelquefois cru sérieusement déclaré pour Mylord G… ; mais je n’ai jamais parlé en sa faveur, que pour répondre à des objections dont je n’ai