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and that His Majesty has given orders to the Lords of Admiralty, to direct the commissioners for sick and hurt seamen to secure and maintain them. » (Can. Archives, Vol. II, 1905, No. 18). Et ce ne fût que 10 ans plus tard, en 1766, que les Lords du commerce furent pleinement renseignés ! Enfin, supposons qu’ils ne savent bien tout qu’en 1766. Quels regrets, bien plus, quelle indignation ils vont éprouver ! Nul doute qu’à la première occasion le gouvernement va s’empresser de réparer les désastres commis. Voici la guerre de l’indépendance américaine. Les Loyalistes passent la frontière. Qu’arrive-t-il ? Un reste d’Acadiens vit retiré sur la Rivière St-Jean. C’est un petit noyau d’habitants qui ont échappé à la dispersion. Le gouvernement leur ôte leurs terres pour les donner aux Loyalistes. Allons, les Acadiens reprennent encore une fois les bois. Ce sont eux qui ouvrent la région connue sous le nom de Madawaska, peuplée aujourd’hui par leurs descendants.

Plus tard, en 1798, il existe quelques cents familles d’autres Acadiens dans les Îles de la Madeleine où l’on n’avait pu qu’imparfaitement pousser la poursuite, trente ans auparavant, et où quelques-uns avaient trouvé un refuge. Paraît un favori du pouvoir, Isaac Coffin. Il s’agit de récompenser ses services. Le gouvernement accorde à Isaac Coffin les Îles de la Madeleine, à titre de fief. Les Acadiens, de propriétaires qu’ils sont, deviennent tout à coup censitaires. Quels regrets ! Quelle réparation ! Continuons.

Les misères de l’exil, le souvenir de la patrie lointaine ayant poussé quelques familles à retourner habiter quelques coins isolés du sol natal, ces familles, avec quelques débris d’autres qui ont pu échapper à la dispersion, se sont multipliées au point de reconstituer un peuple que l’on avait cru à jamais éteint. Qu’a fait jusqu’ici l’Angleterre pour réparer les anciennes fautes ? Nous ne voyons pas que le serment du test ait été aboli plus tôt à la Nouvelle-Écosse qu’ailleurs, c’est-à-dire pas avant 1827. Combien a-t-il fallu de temps pour permettre à un prêtre catholique de pénétrer en territoire néo-écossais ? Et depuis ? Richard écrit que le gouvernement anglais, une fois l’acte consommé, dut bien en accepter les conséquences. La manière d’agir de l’Angleterre, en ce cas, constituerait tout au plus ce que son propre code de lois criminelles appelle la complicité après le fait ; c’est une bien pauvre excuse aux yeux de la morale. Un fait terrible se dresse contre la métropole anglaise, à savoir : l’un des plus lourdes fautes de sa politique coloniale en Amérique, un crime national sans nom, a été perpétré et est resté sans réparation !

Pour achever cette discussion déjà si longue sur un point particulier, ne semblerait-il pas que si la France doit être tenue responsable des malheurs qui ont affecté ses établissements d’Amérique, l’Angleterre doit répondre aussi des siens ? Or, voici encore un reproche que je ferai à l’auteur d’« Acadia », et c’est celui de n’avoir eu que des duretés pour le pays de ses ancêtres, tandis qu’il exalte outre mesure ce lieu commun qui s’appelle la sagesse anglaise. Le succès a le don d’entraîner les meilleurs esprits. L’Algérie, les contrées orientales conquises par la France, et même notre Canada français, achèvent, heureusement, de tuer cette légende que la France n’a pas d’aptitudes colonisatrices.