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« Il ne fait pas de doute que les Acadiens, s’ils eussent été laissés à eux-mêmes, n’eussent prêté le serment requis, (après le traité d’Utrecht). Mais les autorités françaises du Canada et du Cap Breton firent tout en leur pouvoir pour les en empêcher, et employèrent des agents à fin d’entretenir leur hostilité à l’égard de l’Angleterre. Parmi ceux-ci les plus actifs furent les prêtres français, qui, en dépit du traité, persuadèrent à leurs troupeaux qu’ils étaient encore les sujets du roi Louis[1]. »

Et plus loin : « Tout le clergé acadien, à un degré ou à un autre, semble s’être servi de son influence pour empêcher les habitants de prêter serment, et pour leur persuader qu’ils étaient toujours sujets français. Quelques-uns de ces prêtres étaient brouillons, turbulents et méfiants ; les autres étaient trop tranquilles pour plaire aux Officiers de la Couronne[2]. »

Pareille accusation est répétée par cet historien sur tous les tons et dans les termes les plus formels. Or, de deux choses l’une : ou ces missionnaires avaient l’influence que leur prête si généreusement Parkman, ou ils ne l’avaient pas. S’ils l’avaient, comme les Acadiens restèrent tout de même fidèles à leur serment, c’est donc que l’influence des prêtres sur eux s’exercer dans ce sens ; et alors l’accusation de Parkman ne tient pas debout ; — ou c’est que les Acadiens, qu’il aime à nous représenter comme de pauvres gens n’ayant aucune volonté personnelle, et se faisant les dociles instruments de l’ingérence cléricale, étaient au contraire capables de résistance, de fermeté et d’indépendance de jugement. L’une et l’autre alternative confondent les

  1. Montcalm and Wolfe, vol. I, ch. IV, p. 95.
  2. Ibid. p. 110. — Cf. également A Half-Century of Conflict, vol. I, ch. ix, p. 210 : From first to last, the Acadians remained in a childlike dependence on their spiritual and temporal guides.