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leurs efforts pour décider les Acadiens à se joindre à eux. Or, comment résister à une attaque possible ? Le fort d’Annapolis était presque démantibulé ; la garnison comprenait cinq compagnies de trente-et-un hommes chacune ; et sur ces cent-cinquante-cinq soldats, un tiers était invalide. Dans une lettre du 1er  décembre 1743, adressée au Secrétaire d’État, il se plaignait amèrement de la situation[1] : « Je demande la permission de représenter les difficultés avec lesquelles nous serons aux prises, advenant une rupture avec la France… Les habitants de cette province, à l’exception des garnisons d’Annapolis et de Canso, sont tous des Français catholiques romains, qui, en retour du serment d’allégeance qu’ils ont prêté, ont pu garder leurs biens et pratiquer leur religion. L’on ne peut compter sur le concours de ces gens, en cas de rupture avec la France ; ce sera déjà beaucoup si nous pouvons les empêcher de se joindre à nos ennemis, ou de céder à la révolte que ceux-ci essaieront de fomenter parmi eux. Par mesure de précaution, j’ai cherché par tous les moyens, surtout depuis que je suis chargé de l’administration de cette province, à leur faire apprécier les avantages dont ils jouissent sous le Gouvernement Britannique, de façon à les détacher de leurs anciens maîtres ; mais, pour arriver à un résultat sérieux et efficace en ce sens, il faudra beaucoup de temps ; et d’ici là, cette province se trouve dans une pire condition de défense que les autres colonies américaines, lesquelles ont des hommes pour les protéger, tandis que nous, loin de pouvoir nous reposer de ce soin sur nos habitants, nous devons nous méfier d’eux. »

  1. Akins, p. 128-9.