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apparence que les Anglois ont pour eux cinq têtes couronnées, que l’Espagne gardera une parfaite neutralité ; que la france est dénuée de forces maritimes ; que le Roy de france n’a point de sentiment s’il ne tire point vengeance de ce qu’on lui a fait dans l’affaire de Beauséjour ; il avoue cependant que les françois sont rusés et qu’ils ne sont jamais plus à craindre que quand ils le paroissent moins.

Ces Messieurs prétendent encore qu’ils nous ont pris des vaisseaux marchands qui retournoient en france l’automne passé. Je ne sçais si ce ne sont pas des vaisseaux de la Compagnie des Indes.

Ils avouent qu’on travaille à la paix, et disent qu’il y aura grande guerre ou grande paix.

Fasse le ciel que ce soit une paix constante et durable, digne de la bonne foi que nous avons eue pour un ennemi qui à notre égard s’est comporté, j’ose le dire, en vrai forban.

Monsieur de Boishébert fait partir vingt deux Sauvages canibas des plus braves qui vont faire un coup vers Beauséjour.

Monsieur le Général me manda dernièrement que son intention est qu’on ne donne aucun repos à l’ennemi, qu’on le harcèle, qu’on le déconcerte à toutes forces.

Il mande à Monsieur de Boishébert de faire passer les Accadiens sur l’Isle Saint Jean ou à la Rivière Saint Jean, mais je pense que cet ordre n’est que provisoire et on voit assez clairement même parce qu’il me fait l’honneur de m’écrire qu’il attend l’ordre de la Cour pour disposer des Accadiens, sans vouloir rien statuer de son chef sur l’évacuation de ce pais.

(a) On nous dit que Monsieur le Général a gardé un profond silence sur les derniers pacquets que vous lui avez envoyé qu’il n’en a rien transpiré absolument, ce qui a surpris le public ; on a cependant vu les mouvemens se multiplier et l’on (sic pour la) conjecture est bien éloignée de vouloir abandonner l’Accadie. (a)

Monsieur Lévesque me marque que Monsieur le Général ne veut point prendre sur luy de faire passer les Accadiens en Canada quoiqu’il en soit, j’appelle toujours mes habitans au bord de la mer ils y seront plus sûrement et seront à portée de tout.

Comme j’ai eu l’honneur de vous l’écrire plus haut, Monsieur de Boishébert vient de faire passer en Canada les Équipages des deux bâtimens pris à la Rivière Saint Jean, il y fait passer aussi six prisonniers que Monsieur de Niverville avoit fait cet automne.

Cette dernière prise a été faite en exécution des premiers ordres que Monsieur de Vaudreuil a donné dans l’Accadie et sur laquelle il a donné des marques d’une satisfaction bien sensible à Monsieur de Niverville.

Je vous prie, Monsieur, d’excuser la longueur de cette relation. J’ai appréhendé en voulant trop abréger de retrancher quelque fait utile ou même important.