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En arrivant au fort il trouva M. Scot dans des préparatifs pour venir le long des côtes surprendre le camp de Monsieur de Boishébert à Cocagne que ne fit-il pas pour l’encourager ? mais heureusement pour nous les connoissances qu’il donna sur ce point ne servirent qu’à persuader Monsieur Scot de l’impossibilité ou il étoit d’exécuter cette entreprise par terre.

Il a dit encore bien à propos pour nous, qu’il y auroit ici un officier tout l’hiver avec une quantité de Sauvages. Ce malheureux détermina encore Monsieur Scot à armer une piroque pour aller se saisir des Pères Germain et de la Brosse qui se tenoient dans des maisons au haut de Petcoudiak à quinze lieues de Beauséjour, mais la quantité des glaces ou plutôt la Providence fit échouer ce projet. Je ne finirois pas si je voulois suivre ce traître dans toutes ses démarches indignes.

Je tiens ses détails de Pierre Suret qui a déserté récemment de Beauséjour. Toutes ces connoissances mît l’anglois à portée à nous faire bien du mal, nous travaillons cependant à nous en garantir en donnant une nouvelle face à nos affaires, nous avons changé notre camp et les habitans leurs retraites ; nous nous tenons d’ailleurs sur nos gardes c’est tout ce que nous pouvons faire. Mais je reviens à Monsieur de Boishébert.

Il se remit en compagne vers le vingt Janvier, il ignorait alors la désertion de Daniel, il avoit tout à espérer de la bonne volonté de ses gens, ses premières découvertes lui annonçoient des occasions favorables, mais il ne pensoit pas que Daniel instruisoit alors les Anglois pour le surprendre.

Ce malheureux savoit à peu près où il devoit camper, l’anglois profita de ses connoissances, sortit le vingt-cinq du même mois avec deux cent trente homes, et vint tomber avant le jour sur une maison scituée dans les bois, à une demie heure du camp de Monsieur de Boishébert.

(a) Monsieur Scot, commandoit lui-même ce party, il se croyoit sûr de prendre Monsieur de Boishébert et de s’en faire pilotter à Cocagne (a)

Il comptoit l’y surprendre, mais n’y ayant trouvé personne et craignant de s’engager plus avant, il reprit le chemin de Beauséjour après avoir allumé le feu dans cette maison.

Monsieur de Boishébert était à l’abri de la surprise, il avoit plusieurs gardes avancées qui l’avertirent des approches de l’ennemy comme il partoit luy même avant jour pour aller se gabioner sur le chemin de Beauséjour, et partit à la pointe du jour par des routes détournées et tomba avec ses plus braves sur l’arrière garde de l’ennemy, il en auroit fait un grand carnage si tous ses gens l’avoient suivi, une grande partie effrayée par le nombre des ennemis et craignant d’ailleurs d’être investi n’osa sortir du bois ; on engagea cependant l’action qui dura une demie-heure, l’anglois voyant son arrière garde trop foible, fit replier l’avant garde pour la soutenir et se mit en devoir de nous investir.

Monsieur de Boishébert ne voyant à ses côtés qu’un petit nombre de braves et par conséquent se trouvant dans l’impossibilité de résister avec une