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à la surface ce que vous vous êtes efforcé de voiler ; laissez les démasquer la cupidité qui fut le motif de ce drame ; laissez les accorder le tribut d’une larme aux victimes. Tout Acadien porte encore une plaie dans son cœur ; avivez-là si vous le désirez, mais laissez venir à nous les âmes tendres, les consolateurs, car nous avons faim du pain de la consolation ! Laissez le baume qu’ils versent sur nos plaies neutraliser le fiel que vous avez répandu ! Laissez les poètes compatir à nos souffrances et nous tendre la main de l’amitié. « L’amitié, comme le disait si éloquemment Haliburton, dans le discours auquel nous faisions tout à l’heure allusion, est naturelle au cœur de l’homme ; elle est comme le lierre qui cherche le chêne, s’attache à son tronc, embrasse ses branches et les entoure de superbes festons ; il grimpe jusqu’à son sommet et balance sa bannière de feuillage au-dessus de sa tête, comme s’il triomphait d’avoir vaincu le roi des forêts. » Croyez-le, M. Parkman, l’humanité est et sera toujours ouverte aux sentiments nobles et généreux, et vous n’avez pas encore atteint le prestige qui vous fera fermer aux poètes et aux romanciers la source féconde qui a immortalisé Longfellow, et immortalisera encore, nous l’espérons, d’autres de vos compatriotes ! Si la civilisation est le fait de l’intelligence, du développement de la science et de nos facultés, elle est plus encore celui du cœur ! Toucher le cœur de l’homme, c’est le civiliser, le rendre meilleur ! Le cœur est la grande voie par laquelle toute civilisation doit passer[1] !

  1. Note du MS. original : — « L’abbé Casgrain a cru remarquer, chez les Acadiennes des Provinces Maritimes, une expression de tristesse douce et résignée, qui lui a semblé contraster visiblement avec l’expression vive et enjouée