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ces motifs ont porté le conseil auquel assistait Lord Colville, contre-amiral de Sa Majesté, à être unanimement d’opinion que pleine liberté de s’en aller fût laissée aux Acadiens… « Leur établissement dans les Antilles les éloigne de nous, et, comme le climat de ce pays est mortel aux gens du Nord, il n’est pas probable que les Français tirent beaucoup d’avantages de cette immigration… »

Il fallait que la mesure de l’iniquité fut bien comble, pour que l’exaspération poussât ces gens à abandonner leur pays, celui de leurs ancêtres depuis cinq et six générations, et cela, pour se confier de nouveau à la merci des flots, pour aller chercher refuge dans une île lointaine, où le climat avait tué leurs parents, et allait, ils le savaient, décimer de nouveau leurs familles. Wilmot le savait bien lui aussi ; par trois fois il avait conseillé la déportation dans ces îles, et rendu impossible, par ses représentations, leur transmigration à Miramichi, au Canada, ou même dans la Nouvelle-Angleterre, en tout endroit d’où leur retour lui paraissait à redouter. Nous avons vu qu’il disait hypocritement aux Lords du Commerce : « Au Canada, les Acadiens ne seront ni bien traités ni heureux. » Ne voyons-nous pas, par la lettre ci-haut, qu’il ne peut cacher aux Lords l’idée toute réjouissante pour lui que le climat qu’ils vont rencontrer leur sera mortel ?

Il savait que ce dénouement ne serait pas du goût des Lords ; aussi, de même que Lawrence s’était, neuf ans plus tôt, mis à couvert sous le nom de Boscawen, ainsi Wilmot se mettait ici à couvert sous celui de Lord Colville. On a vu plus haut, que ce noble Lord avait été, lui aussi, intéressé dans le départ des Acadiens par un octroi de leurs terres. Toujours les mêmes moyens, les mêmes ruses