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insu des mots de malédiction. Est-il équipage tombé au pouvoir des féroces insulaires de l’Océanie qui ait enduré autant de tortures morales que ces pauvres victimes de l’oppression d’un tyran ? Et ceci se passait dans un pays civilisé, dix-huit siècles après l’avènement du christianisme et l’apparition de Celui dont l’enseignement fut essentiellement un enseignement de charité, d’amour du prochain, à la veille d’une révolution qui devait se faire au nom de la liberté[1]! Elle est bien lente, l’évolution qui doit amener l’humanité à comprendre et à pratiquer le véritable esprit qui constitue le christianisme. Il n’est pas étonnant que l’inquiétude travaille les âmes, et que les meilleurs esprits se demandent si notre état social n’est pas un obstacle irréductible au plein développement des principes que nous devons à l’Évangile.

En cette lin de siècle, l’on s’imagine avoir atteint un haut degré de civilisation. Mais cela est-il bien certain ! Comme preuve, l’on montre les progrès matériels que le monde a faits, les inventions, les découvertes de toute nature qui ont surgi. Qu’est cela, sinon le résultat de l’ingéniosité ? Notre âge est ingénieux, c’est incontestable. Cependant, l’expansion, le progrès de l’esprit chrétien, en quoi réside la vraie civilisation, a-t-il marché de pair avec les conquêtes dans l’ordre matériel ? L’on protège l’animal par des lois dont le but est de l’exempter des souffrances physiques. Et l’homme, être moral, capable de souffrir, alors même que son corps n’est pas touché par la douleur, ou que

  1. Inutile de faire remarquer ce qu’a de peu judicieux ce rapprochement entre l’avènement du christianisme et celui de la révolution. La révolution a été la contrefaçon du christianisme.