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écrasé une fourmilière. Tout ce qui ne se rattache pas à l’activité fébrile de son époque ne mérite pas autrement son attention sympathique. Ces Acadiens simples et ignorants n’ont aucun droit à sa commisération ; ils pouvaient être moraux, très moraux, mais ils tenaient trop à leur nationalité, à leurs coutumes, à leur langue. Sentimentalisme morbide que tout cela ! Ils auraient dû oublier ces choses, se fondre avec leurs maîtres en une masse homogène. « Vous êtes des ignorants, des arriérés. Faites place à d’autres ! » Voilà comme il raisonne. Il parle fréquemment de hard facts, de durs faits. Les hard facts, cela veut dire, pour lui, écraser un obstacle par n’importe quel moyen. L’audace de Lawrence l’a tout particulièrement captivé : « Il était résolu, inflexible ; sa volonté énergique ne pouvait se laisser affecter par des sentiments plus doux. L’humanitarisme plein d’effusion qui sévit aujourd’hui lui était étranger. » Bravo, Lawrence !

Parkman a pu se croire hors d’atteinte à la justice immanente de l’Histoire ; mais l’impunité n’est jamais éternelle ; elle n’existe pas plus pour l’historien que pour les auteurs des événements qu’il raconte. Tôt ou tard arrive l’heure de l’Expiation : car, si le public est indulgent pour les travers de l’esprit et les écarts de jugement, il ne l’est pas à l’égard de ces fautes qui entachent l’honneur. La manière dont Parkman a apprécié ces « hard facts » se retournera contre lui ; elle sera sa propre condamnation[1].

[Parkman, dans son Montcalm and Wolfe, parlant du vasselage clérical auquel sont soumis les canadiens-français, dit

  1. Le paragraphe qui suit n’est pas dans le MS. original. Nous le traduisons d’après la version anglaise (II. 1701.) et le mettons entre crochets.