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Monsieur de Boishébert à la tête de 125 Accadiens ou sauvages les joignit à la rivière Petkoudiac ; il les attaqua et les combattit pendant trois heures il les repoussa vivement jusques à leurs batimens. Les Anglois eurent 42 hommes tués et 45 blessés. Monsieur Gorhant, officier anglois très zélé fut du nombre des blessés, nous perdîmes un sauvage et eûmes trois de blessés, si les sauvages eussent été moins vifs il n’auroit pas échappé un seul Anglois. Monsieur de Boishébert, passa la nuit sur le champ de bataille, il facilita les Accadiens à recueillir une partie de leurs grains et à se retirer dans les bois avec leurs femmes et enfans il leur a envoyé une grande gabarre pour accélérer leur retour à la rivière St Jean.

Les sauvages ne peuvent qu’être annimés contre les Anglois ; ils ont coupé par morceaux 14 sauvages de la mission de la rivière St-Jean qu’ils surprirent le long des habitations angloises.

Les Anglois ont pris contre le droit des gens le nommé Grandcour, sergent du détachement de Monsieur Boishébert, bien avant qu’ils ûssent pris Beauséjour. Ce sergent avoit été par ordre de Monsieur de Boishébert, dans une chaloupe à la recherche de neuf soldats qui s’étoient écartés de l’Isle de la Perdrix ; il avoit un ordre de son commandant par lequel il réclamoit même l’asistance des Anglois si le cas l’exigeoit.

Je n’ay rien négligé pour sçavoir la situation des Anglois à Beauséjour ils sont au nombre d’environ 900 hommes, ils avoient commencé à rétablir l’intérieur du fort, mais depuis qu’ils détiennent les habitants ils ont cessé.

J’ay donné ordre à Monsieur de Boishébert de se maintenir à la rivière St-Jean. Monsieur l’Intendant lui a fait passer les secours nécessaires pour y hiverner. Le Révérend Père Germain est à Québec, et j’espère qu’il ne tardera pas à aller joindre ses sauvages.

Plusieurs raisons, Monseigneur, m’obligent à faire rester Monsieur de Boishébert à la Rivière St-Jean.

1. Tant que j’occuperay cette rivière et y auray un détachement, je conserveray au Roy la possession de l’Accadie, et les Anglois ne pouront pas dire qu’ils ont forcé les François de l’abandonner.

2. Je m’assureray de la fidélité des Accadiens et des sauvages, qui sans cela se croiroient abandonnés et se livreroient peut-être d’eux-mêmes aux Anglois.

3. Monsieur de Boishébert attirera à luy tous les Accadiens ceux qui sont à sa portée comme ceux qui en sont éloignés ; s’attachera à les réunir avec leurs familles et à en former un corps. Les Accadiens ainsy réunis seront obligés pour leur propre sûreté à repousser vivement l’ennemy s’il se présente.

4. Il s’occupera également de la réunion des sauvages et en formera un corps également considérable, il correspondra avec Monsieur Manach, missionnaire à Miramichy, et suivant que le cas l’exigera il joindra les sauvages de cette mission aux siens, pour s’opposer aux progrès de l’ennemy.

5. Il sera en état d’avoir constament des découvreurs à Beauséjour, et à Halifax, et de faire quelques prisonniers qui l’instruiront de la situation et des forces des Anglois.