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les entreprises ouvertes ou déguisées, de la part des gouverneurs, pour retenir dans leurs filets une population qui depuis longtemps voulait à toute force sortir du pays.

La fondation d’Halifax, bien qu’exécutée à la onzième heure, réparait, dans une certaine mesure, l’erreur commise par les Anglais, erreur qui n’eût pas pour eux de conséquences fâcheuses, grâce aux mœurs paisibles des Acadiens : ces derniers seuls eurent à en souffrir, et au delà de toute expression. À raison de ce retard, retenus contre leur gré dans la province, sous un prétexte ou sous un autre, ils durent y attendre l’heure néfaste ou un gouverneur sans âme et sans entrailles les broya sous sa botte et dispersa leurs débris aux quatre vents de l’exil[1].

  1. « Lorsque l’on considère la conduite dos deux nations rivales, de 1720 à 1750, on s’aperçoit facilement aujourd’hui qu’elles ont commis l’une et l’autre une faute identique, en négligeant d’occuper en temps utile l’importante situation de Chibouctou : en effectuant cette occupation dès l’année 1700, les Français auraient à jamais consolidé la possession de l’Acadie…, quant aux Anglais, si, au lieu d’attendre jusqu’en 1749, ils eussent fondé Halifax en 1720, avec une colonie anglaise suburbaine, ils eussent tout de suite assuré la subsistance et l’indépendance de leur garnison et créé en même temps une population similaire à eux-mêmes… Pourquoi ont-ils prodigué tant d’efforts pour retenir sous main et malgré elle une population qui voulait émigrer ? Nous le savons aujourd’hui, c’est qu’ils avaient besoin d’elle. Mais ce besoin disparaissait par l’occupation d’Halifax… Les Acadiens fussent restés libres alors… leur départ eut été facile, et sans inconvénients pour personne. Les Anglais se fussent épargné de la sorte ces odieuses violences auxquelles ils se trouvèrent acculés peu à peu en 1755, par les tergiversations et la duplicité de leurs gouverneurs… »

    Rameau. Une Colonie féodale… T. II, ch. XIV, pp. 134-5.

    « The course adopted of founding a place of strength at Chibouctou, on the eastern coast of this province, and making a settlement there of settlers of British origin, was, in these circumstances, a measure of wisdom and forethought. Not only did it strengthen the power of government within the province itself, but it afforded a place suited in every vi’ay for fleets and armies to he afterwards employed in the reduction of Canada. Nova Scotia was no longer to dépend for military support and relief upon New England, but on the con-