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ments, l’Angleterre agissait sous celui des intérêts. Quand l’une travaillait à s’assimiler ses nouveaux sujets en respectant leurs usages et leurs traditions, en les associant aux privilèges et aux droits communs à tous, en se faisant douce et aimable, l’autre cherchait à se les assimiler par la violence ou la ruse. Si, à ses autres qualités si nombreuses et si solides, l’Angleterre eût joint la bonté, elle serait aujourd’hui doublement la maîtresse du monde ; ce continent lui appartiendrait encore en entier ; l’Irlande, au lieu de lui donner tant de fil à retordre, lui serait dévouée et constituerait l’un des plus beaux fleurons de sa couronne. Mais, chez les nations comme chez les individus, il y a des qualités qui sont incompatibles.

À travers toutes les vicissitudes de son histoire, la France est toujours restée une, politiquement et économiquement, avec ses colonies. En guerre ou en paix ou en révolution, sous un roi, un empereur ou une république, sous les Bourbons, les Bonapartes ou les d’Orléans ; sous un tarif ou sous un autre, ses colonies acceptèrent sans une plainte cette fédération et se soumirent à tous les changements de régime. L’Angleterre ne pourra jamais arriver à une telle fin. Le choc des intérêts y fera obstacle[1].

  1. Sur un demi-feuillet, intercalé entre le feuillet 420 qui termine ce chapitre dans le MS. original, et le feuillet 421 où commence le ch. xxi, il y a les lignes suivantes, au crayon, et de la main de l’auteur :

    « L’égoïsme n’est jamais aimable. C’est lui cependant qui a toujours fait le fond de la politique anglaise ; il est même devenu traditionnel, et c’est ce qui explique l’aversion qu’en tout lieu on porte à l’Angleterre. On ne peut se défendre de la haïr, mais en se rendant compte que seule elle savait et seule elle sait encore coloniser, organiser et mettre en valeur. On conçoit combien grande doit être sa tentation de se substituer par la violence ou la ruse aux peuples qui ne savent pas utiliser leurs richesses. L’excuse ne suffit pas, mais il n’en est