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inspirations de son cœur ? Henriette admira le Marquis, et souhaita qu’un heureux naturel répondît à cet aimable extérieur. « Me pardonnerez-vous, Monsieur, lui dit-elle, d’entrer malgré vous dans votre confidence, de chercher à pénétrer vos secrets, d’oser vous demander compte d’une conduite, dont l’apparente irrégularité est sans doute autorisée par le motif caché de vos démarches : refuserez-vous de m’instruire de vos desseins sur Ernestine ? »

« En vérité, Mademoiselle, je n’en ai point, dit le Marquis, et vous ne sauriez croire combien vous m’embarrassez par une question que je me suis faite mille fois, sans pouvoir me donner à moi-même une réponse satisfaisante. Je désire la tranquillité, le bonheur d’Ernestine ; je me suis occupé des moyens de la rendre heureuse, mon cœur s’est avoué ces intentions, je ne m’en connois point d’autres. Oserois-je à mon tour vous demander, Mademoiselle, ce qui vous paroît irrégulier dans mes démarches, et pourquoi vous semblez blâmer ma conduite » ?

« Je suis fâchée, Monsieur, vraiment fâchée, reprit Henriette, que vous puissiez vous croire à l’abri du reproche en exposant la réputation d’une jeune personne dont la sagesse est l’unique bien. Aviez-vous le droit de la soustraire à ma vue, de la priver de mes conseils, de l’engager à quitter un état simple, mais paisible, pour lui faire goûter les douceurs d’une opulence passagère, l’accoutumer à en jouir, et peut-être la conduire à se les assurer par le sacrifice de l’honnêteté de ses mœurs ? Eh quoi ! Monsieur, vous ne vous reprochez rien, quand vous vous êtes plu à